Résultat des chasses

01.11 : 2 proies.
02.11 : 1 proie.
03.11 : 2 proies.
04.11 : 1 proie.
05.11 : 1 proie.
06.11 : 0 proie.
07.11 : 0 proie.
09.11 : 2 proies.
10.11 : 2 proies.
11.11 : 2 proies.
12.11 : 2 proies.
14.11 : 0 proie.
15.11 : 2 proies.
16.11 : 1 proie.
17.11 : 2 proies.
18.11 : 0 proie.
19.11 : 1 proie.
21.11 : 2 proies.
22.11 : 0 proie.
23.11 : 2 proies.
24.11 : 2 proies.
25.11 : 2 proies.
26.11 : 1 proie.

01.11

- Oui, oui. [...] Je comprends. Non, laissez. Je m’en occupe.

Lunaire poussa un soupir en fuyant le mâle âgé. Il venait régulièrement se plaindre, ces derniers jours. Elle ne savait plus réellement quoi faire pour lui ; il râlait simplement pour râler.
Le côté très inaccessible de la femelle Alpha rendait les rapports difficiles avec les Yuubae. Certains n’osaient pas aller la voir — pour cause, pas sûr que sa meilleure amie aurait accepté de perdre son temps à écouter des bêtises. Lunaire, pour sa part, devait s’y résoudre. Quelqu’un devait le faire.

- Lunaire !

Elle pressa le pas. Casse-pied en vue. Gros casse-pied en vue. Elle mima l’urgence, s’excusa en silence, puis s’engouffra dans la végétation. Il y avait peu de choses que la Veilleuse n’aimait pas à Yuubae, le camp en faisait parti ; les loups avaient tous un truc à demander, une histoire à raconter. Autant de mots inutiles qui lui coûtaient de précieuses minutes.

Une fois à l’écart, l’ancienne Sentinelle s’accorda une pause de courte durée avant sa prochaine ronde. Elle avait une bonne heure devant elle. Elle en profita donc pour chasser, échauffant ses muscles par la même occasion. Elle ramena d’abord un oiseau de mer — attrapé sur la plage —, puis un glouton. Celui-là devait être malade car il ne chercha pas à se défendre plus que cela.

02.11

- Doucement… Tu dois rester face au vent pour ne pas être repérée.

Sa mère avait reçu une nouvelle apprentie, dernièrement. Une gamine douce, polie, qui avait rapidement donné des boutons à Lunaire — pour cause, la femelle était son contraire. Complexée par ses piètres capacités, pourtant, le poupon était finalement venu chercher du secours auprès de la Veilleuse. Drôle de choix, hein ? Elle avait un mentor chasseur mais préférait s’encanailler avec une sentinelle.
Lunaire le vivait cependant plutôt bien ; la femelle faisait une bonne occupation pour les heures libres.

Elle regarda l’adolescente aux poils ébènes se placer soigneusement. Elles étaient sur une piste fraîche. Elles remontèrent lentement jusqu’à l’animal : un phacochère. Lunaire était ravie. Rien de tel qu’un peu de danger pour épicer une chasse. Quand l’apprentie réalisa néanmoins à quoi elles avaient à faire, une peur indescriptible passa dans ses yeux. La Veilleuse la rassura d’une bourrade.

- Je suis là. Ça va bien se passer.

La plus jeune opina du chef, puis se plaça de sorte à pouvoir agir. Lunaire se présenta devant leur proie qui renâcla bruyamment. Après plusieurs esquives, quelques coups de crocs, l’intervention maladroite de l’adolescente et des ordres aboyés par l’aînée, l’animal s’écroula à leurs pattes. Avem poussa une exclamation de pur bonheur.

03.11

- Tu as vu de quelle manière j'ai rabattu le chevreuil ? C'était bien, hein ?
- Oui. Ce n'était pas trop mal pour une débutante.

Lunaire leva les yeux au ciel. Avem racontait pour la sixième fois au moins leurs chasses de la soirée, les prunelles hantées par une passion dévorante. Elle semblait très heureuse de ses résultats. Bien sûr, l'apprentie ne manquait pas de faire les éloges de la Veilleuse, mais se faisait aussi mousser un peu. Elle décrocha au bout d'un moment. Les autres Zêtas faisaient un bon public, pas besoin d'en rajouter une couche.
Lunaire s'éclipsa finalement pour rapporter leurs proies — un chevreuil et une oie sauvage — au garde-manger.

04.11

Lunaire était gelée jusqu’aux os. Régulièrement, désormais, la Veilleuse enchaînait les exercices pour provoquer son pouvoir. Elle était persuadée — comme Impera — de ce plan : encourager la « chose » à sortir de son refuge pour apprendre à la dompter. Les résultats n’étaient pas bons, pourtant. Elles n’avaient vu aucun progrès. Quand il lui semblait réussir à le solliciter, le pouvoir se contentait généralement d’affleurer vers son conscient, puis lui adressait un énorme doigt d’honneur en rebroussant chemin ; uniquement parce que le danger n’était pas avéré.
En gros, Lunaire devait crever pour qu’il daigne se pointer. Enragée — une fois de plus, pour changer — la Veilleuse remonta sur les berges surélevées du lac. Elle s’ébroua longuement pour se débarrasser de l’humidité dans son poil. Elle était sur le point de rejoindre Impera pour râler quand un canard se posa à la surface. Elle lui lança un regard mauvais face auquel l’animal resta de marbre.
Dans une espèce de hurlement guerrier, la Veilleuse se jeta sur la créature qui poussa un cri scandalisé.

Voilà. Son honneur était sauf.

05.11

- Allez. Tu n’es plus un bébé, si ? Tu peux bien marcher dans la boue !
- Mais c’est sale !

Un rire gras se propagea dans l’air. Son auteur ? Lunaire. Qui d’autre ! Elle se moquait doucement de l’apprentie chasseresse aux pattes de velours. La môme était outrée à l’idée de souiller son pelage noir en courant sur une surface glissante ; mais la Veilleuse avait décidé que l’entraînement du jour devait impliquer la saleté. Rien n’était plus dur qu’une attaque coordonnée sur un terrain incertain. Les flaques de gadoue laissées par les pluies récentes remplissaient ce rôle à merveille. Les apprenties sentinelles avaient passé la matinée à se casser la figure dedans.
Lunaire avait, pour sa part, trouvé le spectacle très réjouissant.

Avem céda finalement par fierté. Elle avait un peu d’honneur à sauver, après tout. La Veilleuse lui enseigna à assurer ses prises et sa sécurité, puis décida qu’il était temps de passer aux choses sérieuses. Elles remontèrent une piste — quatre fois perdue par Avem — d’un sanglier. Par miracle, la chasse se déroula bien.

06.11

Lunaire rentrait de sa ronde matinale. Il ne devait pas être six heures mais sa mère était déjà debout. Elle la fusillait même du regard, à mesure que la Veilleuse progressait dans la caverne habitée par les Yuubae. Lunaire mima de ne pas comprendre, de chercher une autre cible à la colère de sa mère en jetant un regard par-dessus son épaule, puis haussa les poils de son arcade sourcilière avec dédain.

- Que se passe-t-il, madame mère ?

L’autre fouetta l’air de sa queue dans un mouvement irrité. Lunaire savait cependant que ce courroux était factice ; sa mère ne connaissait pas le mot « colère ». Elle poussa un soupir excédé.

- Tu donnes des cours à mon apprentie ! En secret, en plus !
- Ah. Qui est l’affreux qui a cafté ?
- Parce que c’est vrai, en plus ?!
- Oui, absolument.
- Tu me fais un enfant dans le dos !
- Hein ?
- Tu devrais avoir honte ! Je suis ta mère !
- Mais…
- Apollo ne te suffit pas ? Tu me prends mon apprentie en plus !
- Apo- Quoi ? C’est quoi ces conneries ?

Hilarité générale autour des comédiennes. Quelques loups s’étaient arrêtés pour regarder la scène de ménage. Même son père semblait trouver ça très drôle. Elle leur ferait bouffer ces sourires suffisants qu’ils arboraient.

- Elle veut seulement être digne de son mentor, c’est tout. Tu es si exceptionnelle, après tout ! Elle est forcément impressionnée par tes talents, c’est dur d’être comparée à un maître pareil… Alors que je suis quoi, moi, hein ? Ta fille ! Rien de plus !

Le visage de sa mère se déforma d’abord d’une moue sceptique avant de s’illuminer d’un sourire.

- On va dire que je te pardonne pour aujourd’hui.
- Yaaaay.

07.11

Les heures passaient doucement. Elle avait du mal à croire que les journées se succédaient aussi vite, que la fin de l’année approchait déjà. Elle avait l’impression de n’avoir rien fait, de n’avoir mené aucun combat. Elle soupira.
Lunaire ne voyait pas de progrès dans leur guerre contre l’oppresseur, ce qui pesait sur ses épaules. Elle avait envie de courir, de voler, d’aller plus vite que la lumière ; de mettre fin à ces foutues tensions et libérer ses proches de la pression. Pour qu’ils puissent vivre tranquillement, sans se faire de soucis. Mais les choses ne pouvaient pas être aussi faciles, alors la Veilleuse gardait ses pensées pour elle en regardant le soleil décliner au-dessus de la mer gelée.

09.11

- Allons-y ! Viiiiite.

Lunaire ronchonna. Le soleil était à peine levé. Avem avait déjà une pêche d’enfer ; pour cause, contrairement à la Veilleuse, l’adolescente avait eu neuf heures de sommeil. Lunaire, elle, s’était couchée quarante minutes auparavant, après une nuit de rondes.
Elle lâcha un juron en se levant, les yeux gonflés et la bouche pâteuse. L’apprentie chasseresse la guida vers leur coin de chasse préféré : la cascade. Les animaux venaient souvent s’abreuver dans le cours d’eau, ce qui leur évitait de courir partout à la recherche d’une piste fraîche.

Un peu patraque et usée, Lunaire préféra ne pas se lancer dans des chasses trop violentes. Histoire de ne pas les condamner à une mort prématurée. Elle se contenta de perfectionner les sauts de Avem en la lançant sur des oies sauvages. Elles en attrapèrent deux grosses.

10.11

Lunaire rentrait avec ses deux proies de la journée : un puma — qui s’était définitivement trop approché des louveteaux à son goût — et un lièvre. Elle bâilla. Elle était épuisée. Elle les ramena au garde-manger puis se coula vers le repère des anciens. Ils se reposaient au chaud, serrés les uns contre les autres. Elle se coucha près d’eux pour recevoir les doléances de la semaine, décidée à soulager leurs peines, et surtout à somnoler en faisant semblant d’écouter.

11.11

La Veilleuse avait passé la matinée au bord des frontières. Elle changeait de plus en plus souvent ses horaires de ronde pour induire leurs ennemis en erreur. Pas question qu’ils puissent prédire ses déplacements ; Lunaire était très sévère là-dessus. Elle avait à nouveau modifié les chemins des sentinelles pour que leurs circuits soient imprévisibles.
Elle faisait aussi régulièrement participer les chasseurs volontaires à des entraînements pour que les sentinelles perfectionnent leurs talents de pisteurs. Ils devaient être capables de reconnaître les signes au plus vite.

Maintenant que sa tâche était achevée, Lunaire rejoignait sa mère et Avem en chasse. Elles avaient proposé à la Veilleuse de donner un coup de patte en prévision de l’hiver, ce que la jeune femelle avait apprécié. Aussi se retrouva-t-elle à courir aux côtés des deux chasseresses pour rabattre un sanglier et un cerf âgé.

12.11

Le soleil dardait ses rayons chétifs sur son visage. Lunaire avait les yeux fermés, les paupières réchauffées par la naine jaune au sommet de son apogée. La Veilleuse n’avait pas l’habitude de faire une simple « pause » à une heure pareille de la journée ; en principe, elle était déjà couchée en prévision de ses rondes de nuit. Elle préférait patrouiller dans la pénombre. Quand elle n’était pas au lit, Lunaire bossait.
Elle ne profitait donc pas souvent des éclaircies.

Elle demeura immobile pendant un moment avant d’être rappelée à l’ordre par son hyperactivité sous-jacente. Elle ne pouvait pas glander plus longtemps. Elle chassa à défaut d’être programmée aux rondes de jour — d’abord un écureuil puis une martre.

12.11

- Maman ? Tu es là ?

Silence. Lunaire avait été prévenue d’un malaise de sa mère une poignée de minutes auparavant, la forçant à quitter ses fonctions pour rentrer. Une sentinelle avait aussitôt remplacé la Veilleuse stressée.
Elle s’approcha de sa mère, allongée dans la tanière de la guérisseuse. Elle avait les yeux collés, les lèvres serrées dans une moue de douleur. Elle lécha longuement les paupières, caressa le front chaud et les joues brûlantes. Assurée par Impera qu’il ne s’agissait que d’un rhume sans gravité, Lunaire décida de rester un peu à ses côtés pour l’apaiser et veiller sur son sommeil.